Toute vie fait surgir d'intenses
instants de joie ou de peine et nous avons besoin d'une présence
à nos côtés, nous accompagnant de sa chaleur aimante
pour apprivoiser l'inconnu dans lequel nous entrons.
Dans l'histoire de Jacob, la présence consolatrice n'est pas
celle qu'il voudrait. Il aime follement Rachel qu'il a découverte
conduisant son troupeau. Le rusé Laban, le père, lui impose
sept années à son service avant qu'il puisse en faire
sa femme. Patiemment Jacob s'est dépensé jusqu'au jour
de cette grande fête. Au petit matin après la noce, Jacob,
fou de la joie conquise, s'éveille et veut dire l'intensité
de son bonheur. Quelle présence est à ses côtés
?
C'est Léa ; Léa aux yeux ternes, bien moins agréable
que Rachel ! La joie devient révolte. De cette substitution imaginée
par Laban, Léa est aussi responsable !
Laban veut bien céder Rachel contre sept autres années
de labeur. Jacob reprend sa vie de pâtre avec intelligence. Quelle
joie est celle d'un bédouin sinon la naissance de fils pour fortifier
sa tribu ? Dieu le satisfait et l'éprouve en même temps.
Six fois des fils naissent. Vers qui se tourner pour dire le bonheur
de voir Ruben, puis Siméon, Lévi, Juda, Issakar, Zabulon?
C'est vers Léa. Le bonheur de Jacob est amer : il aurait tant
désiré féliciter Rachel !
Des péripéties font intervenir les servantes des deux
femmes. Rachel est enfin autorisée par Dieu à donner à
Jacob un fils, Joseph, puis un autre, Benjamin. À sa naissance
Rachel meurt. Qui vient sécher les larmes de Jacob ?
C'est Léa.
Elle cherche à lui parler avec compréhension. Mais Jacob
n'a exprimé ses joies, ses déceptions, qu'auprès
de Rachel. Comment tenter d'apaiser la souffrance de Jacob ?
Nous sommes souvent à la même place, ceux qu'on ne désire
guère et qui, pourtant, sommes là auprès de ceux
qui peinent.
Bernard
Félix