La plage. Le soleil
de Provence qui écrase les corps. Une bourrasque de vent qui
se lève et emporte un parasol. Son propriétaire, debout,
regarde le parasol senvoler puis rouler sur la plage, sans le
moindre mouvement si ce nest celui des yeux qui suivent sa course
folle. Finalement quelquun se lève pour attraper ce qui
aurait pu devenir un objet de supplice. Cette personne sans réaction,
qui se demandait peut-être sur qui allait tomber le sort me fait
penser à toutes celles qui sexclament « quest-ce
quon peut y faire ! » Comme si lensemble de notre
vie nétait que fatalité et que nous ne pouvions
faire autre chose que regarder, impuissant, le cours de notre vie. Triste
fascination qui est celle des téléspectateurs qui ne peuvent
se décoller des informations ou des émissions dites de
réalité. La vie devient un spectacle sur lequel on ne
peut plus agir.
La loi de Murphy affirme que lorsquune situation
peut empirer, elle empirera. Cette loi a un corollaire : quand ça
ne peut plus empirer, ça empirera quand même. Voilà
un énoncé pseudo-scientifique derrière lequel il
semble bien commode de se cacher quand on est dans la fuite ou, plus
simplement, dans limpossibilité daffronter ce qui
ne va pas : une belle excuse pour dissimuler sa paresse, sa faiblesse
ou son désintérêt pour les autres. Prenons les choses
par le petit bout de la lorgnette : lorsquune tartine tombe cest
toujours du côté beurré, disent les fatalistes.
Si cétait le cas, il suffirait de les tartiner du mauvais
côté ! Sur cette plage de Provence, un baigneur ne sest
pas résigné à la fatalité dun corps
embroché. Il sest levé pour faire face, lui qui
nétait pas menacé par le parasol. Il a considéré
que la suite de lhistoire nétait pas encore écrite.
Il ne sest pas seulement demandé sil était
le gardien de son frère, il sest aussi dressé en
homme libre.
James
Woody