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Numéro 196 - Février 2006
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Écrivain et figure emblématique du romantisme, homme politique connu pour ses idées libérales, Benjamin Constant (1767-1830) est aussi l’auteur de De la religion. Cette vaste réflexion sur l’histoire des religions, moins connue que son roman Adolphe, est pourtant la grande œuvre de sa vie.

Benjamin Constant

Connu pour avoir été à la fois l’un des chantres du romantisme et de la démocratie libérale, Benjamin Constant l’est beaucoup moins pour ses travaux sur l’anthropologie religieuse, discipline dont il est d’une certaine façon le créateur et qui aura été la grande passion de sa vie. Dès l’âge de 18 ans, il décide de s’atteler à cette question qui le hante depuis longtemps : pourquoi, au cours de sa longue histoire, l’être humain a toujours été habité par ce qu’il appelle le « sentiment religieux » ? Sa grande intuition est de penser que la compréhension du phénomène humain ne peut pas faire l’économie de celle de la religion. Il ne se doute probablement pas que quarante années de travail et de réflexion l’attendent. L’intégralité de son manuscrit ne sera publié qu’en 1831, après sa mort, sous le titre : De la Religion considérée dans ses sources, sa forme et son développement.

Benjamin ConstantNé en 1767 en Suisse où ses ancêtres français avaient trouvé refuge à la suite de la Révocation de l’Édit de Nantes, Benjamin Constant s’installe à Paris en 1795, quelques semaines avant l’instauration du Directoire. Foncièrement attaché aux acquis de la Révolution française, il défend une voie moyenne à égale distance des extrémistes royalistes et jacobins. Par crainte d’un retour en arrière, il soutiendra discrètement le coup d’État du 18 brumaire, mais son opposition à toute forme de despotisme le rendra vite suspect aux yeux de Napoléon : il est exclu du Tribunat en 1802 et doit quitter la France.

Le retour forcé au pays natal lui donne l’occasion de retrouver Germaine de Staël avec qui il entretiendra une liaison mouvementée jusqu’à leur rupture définitive en 1808. En 1815, il peut enfin regagner la France et reprendre sa place dans l’arène politique. Durant la Restauration, il apparaîtra comme le grand apôtre du libéralisme et s’opposera avec force aux tentations passéistes de la monarchie et du catholicisme.

Libéral en politique, Constant l’est également en théologie. Sa prise en compte du sentiment religieux, qu’une certaine dogmatique protestante a trop souvent feint d’ignorer, le range dans la catégorie de ceux qui mettent en doute la révélation – ce qui n’est pas son cas comme l’atteste son attachement à l’Église réformée et à sa paroisse de Sainte-Marie à Paris où seront célébrées ses obsèques. Comme le fait remarquer Tzvetan Todorov (Un chef-d’œuvre oublié, in De la religion, Benjamin Constant, Actes Sud, 1999), la haute idée qu’il se fait du sentiment religieux le rend suspect aux yeux des dévots autant qu’à ceux des athées : « Pour B. Constant, l’être humain ne coïncide jamais entièrement avec lui-même. Il est fait de sensations et d’expériences mais aussi d’une conscience de soi qui lui permet toujours de s’imaginer autre qu’il n’est, donc d’imaginer un “mieux” en dehors de lui… La religion et l’histoire existent pour la même raison, à savoir cette capacité qu’ont les hommes de se transcender eux-mêmes, d’imaginer un ailleurs qui les pousse à changer. » Détail qui a son importance, B. Constant ajoutait que la religion n’avait d’intérêt que dans l’accueil de l’agir de Dieu : « Que les hommes ne se mêlent pas de religion. Laissons-la à Dieu et à elle-même. »

À sa volonté de comprendre le sentiment religieux dans ses relations les plus complexes d’un point de vue psychologique, sociologique et culturel, B. Constant ajoute le souci d’ancrer sa réflexion dans l’histoire des religions. Il distinguera ainsi les religions « sacerdotales » – qu’il critique vertement – des religions « libres » qui ont évidemment sa préférence. Distinction que reprendra plus tard Auguste Sabatier dans Les Religions d’autorité et la religion de l’Esprit. feuille

Geoffroy de Turckheim

 

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