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Numéro 180-181
août-septembre 2004
( sommaire )

Regarder, Écouter, Lire

Livre : Les Archipels Cathares

Le plus intéressant livre, à mon point de vue, sur les cathares – début et fin de leur histoire, leurs pratiques, leur religion passée, rêvée ou reconstruite – vient d’être réédité. L’ouvrage rassemble les meilleurs textes et études, parus de 1985 à 2000, d’Anne Brenon-Gasc, ancienne directrice du Centre d’Études Cathares de Carcassonne, fondatrice de la revue Heresis et amie ou collaboratrice d’Évangile et Liberté. Les lecteurs protestants et libéraux ne manqueront pas d’y trouver un intérêt, particulièrement dans les chapitres : « le faux problème du dualisme absolu » et « christianisme et tolérance dans les textes cathares et vaudois du bas Moyen Âge ». Par contre, les pas-encore-convaincus-par-les-cathares ( ! ?…) liront avec profit du même auteur Les Cathares, éditions La Martinière (2004), court recueil de 33 textes cathares magnifiquement illustrés (10 €). Une idée de cadeau ! feuille

Michel Jas

Anne Brenon, Les Archipels Cathares. Dissidence chrétienne dans l’Europe médiévale, Préface de Jean Duvernoy, Castelnaud la chapelle, L’Hydre Éditions, 2003, 413 pages, 22 €, ISBN : 2913703313.

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Livre : Enquête sur l’identité de Jésus
Nouvelles interprétations

Qui était Jésus ? Éternelle question qui n’arrête pas de nous surprendre et de faire travailler les théologiens et historiens. L’auteur, Geza Vermes, est issu d’une famille juive, mais fut ordonné prêtre, pour se retourner ensuite vers ses racines juives. Professeur à Oxford, il est spécialiste des écrits intertestamentaires et connaît parfaitement le judaïsme contemporain de Jésus et le christianisme des premières générations. Il nous propose un parcours très méticuleux à travers les textes, qui va de la figure la plus complexe et la plus doctrinale de Jésus à la plus simple et la plus humaine. Ce parcours décape de toutes les divinisations et messianisations qui ont progressivement envahi les communautés chrétiennes dès le IIe siècle.

L’auteur montre que, pour les textes johanniques, Jésus est le divin Fils de l’Homme, directement venu du ciel et y retournant ; tandis que Paul ne confond jamais Dieu et Jésus et établit au contraire une hiérarchie nette entre le Père et le Fils. Il en vient ensuite aux évangiles synoptiques qui laissent entrevoir un maître de sagesse, guérisseur et exorciste.

La démarche, trop résumée ici, n’est pas vraiment nouvelle, mais elle est présentée avec rigueur et clarté et permet aux non-spécialistes de comprendre les arguments, venant des textes eux-mêmes ou de la connaissance du judaïsme de l’époque, qui conduisent à de telles conclusions. À lire absolument pour ceux qui veulent s’y retrouver dans la connaissance contemporaine de Jésus, débarrassée de tous les dogmatismes qui ont voulu brouiller sa trace. feuille

Henri Persoz

Geza Vermes. Enquête sur l’identité de Jésus. Nouvelles interprétations. Bayard, 2003, 21 €, ISBN : 2.227.47040.2.

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Livre : Les nouveaux penseurs de l‘islam

Il est réconfortant de constater que l’islam est loin d’être monolithique et qu’il possède aussi ses penseurs que nous pourrions qualifier de libéraux. Si l’islam politique tend à les occulter ou à les faire oublier, ils n’en sont pas moins présents et leurs avancées théologiques ne peuvent que nous réjouir.

C’est dans cet esprit que l’ouvrage Les nouveaux penseurs de l’islam de Rachid Benzine peut être éclairant. Rachid Benzine est cet auteur musulman français qu’on avait remarqué il y a quelques années lors de la parution du livre Nous avons tant de choses à nous dire, cosigné avec le prêtre Christian Delorme.

L’ouvrage dont nous parlons ici montre l’existence de penseurs qui soumettent le Coran à la critique historique et qui ne craignent pas de mettre en évidence le contexte de la vie de Mahomet pour en comprendre les révélations. Parmi eux, les plus intéressants à notre avis sont les derniers cités dans le livre, Amin al-Khûli et Muhammad Kalafallâh, tous deux égyptiens, et Nasr Hamid Abû Zayd également égyptien dont le procès et l’exclusion de l’université Al-Azhar ont fait grand bruit en 1995 (tel Abélard en face de Bernard de Clairvaux, il préconisait l’usage de la raison pour expliquer les textes sacrés !).

Appuyé sur les travaux de ces contemporains, Rachid Benzine (p. 280) proclame à propos du Coran cette conviction que nous pourrions faire nôtre touchant la Bible :

« Le sens d’un texte se trouve d’abord chez celui qui le lit. Démonter un texte pour voir comment il fonctionne ne suffit pas à trouver le “sens” d’un texte. Un texte s’éclaire pour le lecteur quand il en vit quelque chose. […] Toute lecture est une “relecture”, c’est-à-dire une lecture en situation, une lecture contextuelle. […] Le Coran ne peut être réduit à une seule perspective de lecture. » feuille

Bernard Félix

Rachid Benzine, Les nouveaux penseurs de l‘islam, Albin Michel, 2004, 288 pages, 18,5 €, 2-226-15180-x.

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Cinéma : Retourt et disparition du père

Papa ! Le corps de l’homme gît dans une barque, de tout son long. Les enfants l’ont amené après maints efforts, aux abords du rivage. Mais la barque dérive, fait eau de toutes parts, disparaît. « Papa ! » s’écrient les ados, au désespoir. Il était venu de nulle part après plus de dix ans d’absence. La mère et les fils n’y pensaient plus, le retour du « père prodigue » n’avait rien de celui du fils de l’Évangile. Il ne demandait rien, ne parlait guère. Le lendemain de son retour, il embarquait ses deux adolescents de fils dans une aventure lacustre, à la pêche sur les rives du lac Ladoga. Tout au long du parcours parsemé de coups durs, il ne leur épargna rien : main de fer sans gant de velours. Devant cet inconnu aux brutales manières, la résignation désorientée, ou la révolte, l’envie de meurtre, selon chacun. Puis, tout bascule : le père meurt accidentellement, alors qu’il se précipitait au secours du cadet au bord du suicide auquel il n’était pas étranger.

Nous sommes au terme d’une geste de sept jours… Sept jours, cela ne vous dit rien ? Voilà un film qui pose plus de questions qu’il ne donne de réponses. Le rôle fondateur du père ne passe pas forcément par les signes extérieurs, que l’usage a codifiés, d’une affection d’apparence.

Quant aux fils, à tous les fils, entrer dans l’âge d’homme, c’est aussi faire l’apprentissage des regrets. feuille

Jacques Agulhon

Le retour, d’Andreï Zviagnintsev (Russie 2003) Avec : Vladimir Garin, Constantin Lavronenko, Ivan Dobronravov.

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Disque : Les Cantates de Bach vues de Tokyo

Lentement mais sûrement, Masaaki Suzuki poursuit son intégrale des cantates sacrées de Jean-Sébastien Bach, et à l’écoute de son nouveau disque, le chef japonais apparaît vraiment comme le digne successeur d’un Harnoncourt ou d’un Leonhardt. Les œuvres de Bach trouvent ainsi à leur service des interprètes en tout point excellents, et dès les premières mesures, l’auditeur est saisi par cette musique qui sait refléter les tourments et les joies de l’âme en même temps qu’elle témoigne d’une foi profonde de la part de leur auteur.

Ces trois cantates ont été créées en août et en septembre 1724, deuxième année de la présence de Bach au poste de maître de chapelle de l’église Saint-Thomas de Leipzig : les cantates Herr Jesu Christ, du höchstes Gut, BWV 113, et Allein zu dir, Herr Jesu Christ, BWV 33, l’une basée sur la parabole du Pharisien et du Publicain, l’autre sur celle du bon Samaritain, se rejoignent en ce qu’elles abordent une définition du chrétien ; la troisième cantate, Liebster Gott, wenn werd ich sterben, BWV 8, basée là encore sur le récit évangélique du jour, est l’occasion d’une méditation sur la mort. Toutes dotées d’un effectif instrumental et vocal réduit, force est de constater la variété dans la composition musicale ! Pour s’en convaincre, la seule écoute du chœur introductif de la cantate Liebster Gott, wenn werd ich sterben suffit à réaliser la maîtrise de l’art de la rhétorique : l’agencement de chacun des éléments obéit à une logique qui va bien au-delà de la seule logique musicale, et ce, pour accompagner, illustrer et enrichir le sens des paroles. feuille

Matthieu Baboulène-Fossey

Johann Sebastian Bach : Cantatas from Leipzig 1724 par le Bach Collegium Japan, dir. Masaaki Suzuki ; BIS-CD-1351.

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