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Débat
Protestants et Vendredi-Saint :
défendre un point de vue humaniste de la religion.

On ne peut que se réjouir de la prise de position commune entre Eglises protestantes (mais où étaient les Réformés ?) et catholique au sujet du Vendredi-Saint comme jour férié en Alsace. Il faut cependant souligner que traditionnellement le Vendredi-Saint est un jour de commémoration particulièrement cher aux protestants. En toute logique on attendra d’eux qu’ils affirment leurs convictions et soulignent le respect que celles-ci exigent – aujourd’hui comme hier. Si le rapprochement entre confessions permet le dialogue entre les convictions des uns et des autres, tant mieux.

Mais au moment où le Vendredi-Saint en tant que jour férié se trouve mis sur la sellette par une procédure législative d’abord, visiblement très généreusement soutenue par les élus alsaciens, ensuite par une exploitation mercantile du créneau ainsi ouvert par la loi, on ne peut s’empêcher de se demander où sont les protestants et qu’ont-ils à défendre ?

Si les protestants sont, somme toute, très discrets, et si les réponses à la deuxième partie de la question peuvent varier, il me semble essentiel d’affirmer que c’est leur conception humaniste de la religion que les protestants – et, avec eux, tous les chrétiens et les non-chrétiens qui partagent ce point de vue - ont à défendre. La religion n’est pas un ensemble de mailles dogmatiques plus ou moins ésotériques, mais une attitude de vie. Elle prend en compte les questions existentielles des humains, l’organisation de la vie au niveau social, et le maillage économique, et encourage à chercher des solutions aux problèmes qui se posent.

Ainsi, les protestants fêtent le Vendredi-Saint, non pas pour en faire une sorte d’adoration de la victime expiatoire que Dieu se serait offerte lui-même, mais ils célèbrent l’homme qui a cru et osé : osé aller jusqu’au bout de ses convictions, osé porter un projet de nouveauté de vie religieuse et sociale, osé défier le pouvoir religieux de l’époque et le pouvoir politique romain en esquissant une vie sociale plus juste et plus humaine.

Pâques est alors le complément du Vendredi-Saint, une manière de signifier qu’un chemin reste ouvert à la vie, malgré toutes les menaces qui pèsent sur l’existence humaine. C’est la fête d’une victoire, la victoire de ceux qui, jadis, et à travers l’histoire, et aujourd’hui encore, ont choisi de suivre ce Jésus en continuant l’œuvre du maître-messie : la résurrection est dans leur engagement, bien plus que dans l’adoration d’un petit Dieu à côté du grand.

Les protestants auraient tort de s’arrêter au Vendredi-Saint. Les catholiques auront peut-être à cœur de redécouvrir la dimension proprement humaine de Jésus de Nazareth. Dans ce dialogue alors, ils avancent, que la fête soit fériée ou non. Mais à moins de supprimer toutes les fêtes civiles et religieuses, tout en veillant à ne pas en rajouter d’autres, aucun honnête citoyen, qu’il soit de sensibilité religieuse ou laïque, ne peut accepter ce coup de Trafalgar législatif qui vient de mettre en route un changement important des dispositions du Droit local en Alsace et en Moselle et défier, voire berner ceux qui croient encore à la possibilité de sauver un certain patrimoine régional. Supprimer le Vendredi-saint fêté est une manière de sacrifier le Jésus-humaniste sur l’autel d’un nouveau dieu qui se faufile insidieusement dans tous les recoins de la société, celui du profit à tout crin.

Ernest Winstein
Président de l’Union Protestante Libérale, Strasbourg

 

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