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Numéro 215
Janvier 2008
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À l’occasion du décès récent (le 9 juillet 2007) d’André Chouraqui, Henri Persoz nous rappelle ce qui a amené cet écrivain poète multiculturel à entreprendre une nouvelle traduction, si originale et si personnelle, de la Bible.

André Chouraqui et sa « Bible »

Il y a quelques mois, disparaissait André Chouraqui qui fut bien connu dans les milieux religieux, notamment pour ses traductions en français de la Bible et du Coran ; traductions très osées qui ont irrité bien des exégètes et enchanté d’autres.

Un homme de réconciliation

André ChouraquiAndré Chouraqui est né en 1917 en Algérie dans une vieille famille juive. Jeune, il était déjà frappé par la coexistence des trois communautés juive, musulmane et chrétienne qui s’ignoraient et se méprisaient plutôt sur cette même terre algérienne. Il monta à Paris en 1938 pour y suivre des études de droit qu’il compléta par des études rabbiniques. Résistant, il vit trop de camarades partir, broyés par la shoah. Ceci le pressa de travailler au rapprochement des trois religions « du livre ». En 1957, il émigra en Israël, devint conseiller de David Ben Gourion, puis maire adjoint de Jérusalem, chargé de la culture. Ce plongeon dans la langue, la tradition et les paysages hébraïques lui permit de mieux s’imprégner des textes bibliques, au point que, dans le courant des années 70, il traduisit en français toute la Bible, Nouveau Testament compris. Il voulait que ce travail aide les chrétiens à mieux comprendre leurs racines spirituelles et culturelles juives et aide les juifs à mieux comprendre l’importance de l’histoire de Jésus pour leur propre histoire.

Une traduction audacieuse

Chouraqui a voulu secouer la poussière qui recouvre des siècles de traduction convenue et qui finit par ternir le sens ou l’associer à une compréhension trop occidentale et déjà orientée vers les dogmes. Il s’est replongé dans les racines hébraïques pour essayer de trouver les mots français qui exprimaient le mieux ces racines. Au besoin, il les a inventés. Il a voulu conserver les nombreux jeux de mot de la langue. S’agissant du Nouveau Testament, il a recherché le concept sémitique qui perçait sous chaque mot grec.

Tout traducteur est pris entre des exigences contradictoires : être fidèle au texte, ou bien être compris et apprécié de ses lecteurs. À n’en pas douter, Chouraqui a choisi la fidélité au texte, une fidélité très littérale. Tant pis pour le lecteur qui devra par moments batailler pour comprendre. Notre savant a voulu rendre à l’Orient un livre complètement oriental. Il demande donc au lecteur de se déplacer vers un texte un peu aride pour lui, plutôt que de le lui offrir sur un plateau.

Nous avons donc de belles réussites, et des passages plus ou moins difficiles à avaler.

On accepte volontiers que le Saint-Esprit soit « le souffle sacré » ; qu’Adam soit traduit par « le glébeux », pour conserver le jeu de mot avec la glèbe (ou la terre : adama). On peut aimer le début des béatitudes de Matthieu : « En marche, les humiliés du souffle ». Que la foi soit signifiée par « l’adhérence », passe encore. Mais lorsque la compassion est exprimée par « la matrice », sous le prétexte qu’entrailles et amour ont la même racine hébraïque, cela commence à devenir insolite.

La Bible de Chouraqui peut être utile comme instrument de travail, pour aider à se rapprocher de certains sémitismes ayant forgé le texte biblique. Mais, pour la lecture du soir, pour une lecture édifiante et reposante, mieux vaut nos bonnes Bibles auxquelles nous sommes si bien habitués. feuille

par Henri Persoz

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