Quelque chose me tracasse
dans la façon que nous avons de parler souvent par négation,
ou contorsion, ou déni, en matière de foi : je ne crois
pas que
je ne dirais pas que
cela ne signifie pas que
il ne faut pas se tromper de
Je suis le premier à avoir fait une habitude de
ces contournements. Exemple : Jésus était-il fils
de Dieu ? Je ne le dirais pas ainsi. Bon, mais alors tu
diras quoi ? Et comment ?
Cest une vraie difficulté, les mots de la
foi sont devenus problématiques. Pendant longtemps, jai
pensé quil était nécessaire de taire de ces
mots qui étaient autrefois, pour moi, si chargés de sens.
Le tranchant sen était à la longue émoussé.
On en avait fait souvent, aussi, un usage oppressif.
Faut-il les reprendre, ces mots-là, ou bien faut-il
en trouver dautres ? Une chose est sûre : il faut parler
clair ou se taire. Si je ne sais pas si le mot « péché
», par exemple, a un sens, que je cesse de lutiliser ! Après
tout, le mot hébreu hattat signifie « ratage », et
le grec hamartia veut simplement dire « erreur », alors
pourquoi « péché » ? À la trappe !
Mais cest tout un pan de la théologie classique qui sen
trouve changé
Et lon na pourtant encore rien dit des choses
essentielles. Peut-être parce quon est perdu dans le flou
actuel, au sein de notre environnement, du « croyable disponible
», comme disait Ricur. Entre les rationalistes purs et durs
et les tenants des spiritualités orientales, tout est possible
!
Lerreur est peut-être de prétendre
construire un discours total, structuré, verrouillé, au
sujet de Celui que, par construction, nous ne pouvons saisir. Peut-être
navons-nous plus à notre disposition que le poème
ou la parabole : un art à réinventer, au lieu dune
théologie. Et après tout, ne serait-ce pas suivre en cela
les Écritures ?
Jean
Alexandre