Petit polémiste, dont la notoriété est plutôt enviable, tel est le métier exceptionnel d’Alain Coulang dans un monde d’après, pas si lointain, 2029, soit presque demain ! Mais, à la différence de ses 30 collègues (agréés et assermentés comme lui), notre protagoniste, très parisien, n’est pas politiquement correct dans une société qui recherche la paix intérieure, pratique la notation sociale, met tout en œuvre pour préserver la santé de ses citoyens, après avoir gagné la bataille contre le réchauffement climatique. Ses chroniques télévisuelles sont faites pour provoquer, offenser et « interpeller les âmes usées et résistantes à tout ». Même si la bonne audience d’Alain explique sa relative tranquillité, l’algorithme sait tout, prévoit tout et ne plaisante pas. Un mot peut le faire basculer et il bascule.
Dans ce roman de pseudo-anticipation, l’écriture de Duran Cohen est satirique et drôle. Tous les thèmes abordés nous rappellent l’actualité, des situations bien concrètes que nous vivons en réalité aujourd’hui. Nous ne pouvons que réagir ou sourire jaune. Quant à la conclusion – « Je préférerais être un homme libre dans un monde pollué qu’un esclave respirant de l’air pur » – elle fait réfléchir, plus sérieusement, sur le sens à donner à la liberté sans pour autant nier la mise en danger du vivant. À travers ce récit imaginaire, qui s’apparente à une dystopie, l’utopie vire au cauchemar et conduit à une contre-utopie. Procédé classique mais bien réussi qui intéressera nos lecteurs.
Ilan Duran Cohen, Le petit polémiste, Arles, Acte Sud, 2020, 304 pages.
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