Ce n’est pas un livre savant, prévient l’auteur, néanmoins sa lecture apprend beaucoup sur les courants juifs anciens. Le lecteur est invité à la lucidité sur la fragilité des dogmes, sur le fait que le christianisme, comme d’autres religions, est pluriel. Le sens même du mot hérésie n’a pas toujours été négatif.
Henri Persoz, dans un premier chapitre, liste les principales tendances du judaïsme ancien et pointe dans le christianisme ancien l’apparition de l’orthodoxie au sens de « doctrine juste, droite » et s’interroge : « Qui détient la vérité ? » L’auteur ajoute que « cette doctrine, qui se rattache à ce qu’on appelle la succession apostolique, n’a plus de sens aujourd’hui pour une personne sensée ». Ce point de vue est argumenté. Le chapitre suivant est consacré aux différentes sources extra-bibliques : évangile des Nazoréens, évangile des Ébionites, le Livre de la révélation d’Elkasaï. Un autre chapitre présente la gnose comme « frontière entre la philosophie et la religion » qui a influencé le christianisme. La question christologique n’est pas éludée : l’histoire a « longtemps hésité sur la question de Jésus homme ou Jésus dieu ».
Chaque chapitre se termine par un paragraphe intitulé « à retenir ». Il permet à Henri Persoz de relever des ferments de libéralisme tel celui-ci : « Il n’empêche que c’est bien la lecture « historico-littérale » pratiquée par l’École d’Antioche, prélude de la méthode « historico-critique » chère aux libéraux, qui a aidé Jean Chrysostome à défendre, Bible en main, une politique sociale, utopique dans le discours, mais efficace dans l’action quotidienne. » « Pélage contre Augustin », titre du dernier chapitre, traite de l’éternelle question de la liberté de l’homme « si Dieu est tout puissant et décide de tout ».
L’auteur constate dans les dernières pages que « le christianisme moderne puise certaines de ses racines dans des convictions très anciennes, en marge des Églises des premiers siècles, qui ont été combattues sous prétexte d’hérésie » et partage son bonheur « de les retrouver, surgies de ces temps lointains, parce qu’elles nous parlent encore ».
Henri Persoz, Éloge des hérésies dans l’Église ancienne, La Barre Franche, 2019, 125 pages.
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