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De la nécessité d’articuler intérêts particuliers et bien public

 

Suite aux guerres de Religion qui ont ensanglanté l’Europe du XVIIe au XVIIIe siècle, les démocraties sociolibérales se sont organisées autour de la séparation entre la sphère publique et la sphère privée, à cause de l’incapacité des groupes religieux à s’entendre rationnellement sur leurs visions détaillées et concurrentes du bien. Parce qu’elles alimentaient trop le conflit, les diverses visions religieuses ont été circonscrites dans la sphère privée afin de ne pas saturer l’espace public de leur rivalité. Plutôt que de chercher à imposer par la force une vision, il est apparu préférable de reconnaître la pluralité au sein de la société, faute d’aboutir à un accord unanime sur ce que doit être le bien commun. Dans cet aveu se trouve l’une des forces des démocraties socio-libérales. La pluralité n’est plus combattue, elle est désormais assumée.

Cependant, la volonté de rendre l’espace public le plus neutre possible n’est pas sans soulever quelques interrogations. Le théologien américain luthérien Gilbert Meilaender affirme : « Lorsque notre vie commune reconnaît une pluralité de formes de la bonne vie et le besoin de liberté pour poursuivre nos visions privées de la bonne vie, il sera difficile d’empêcher une croyance en la primauté des intérêts privés de s’introduire et de dominer notre conception de la vertu. » Cette citation met en lumière une tendance de la société libérale, celle de façonner des individus manifestant peu le désir d’ajuster leur intérêt personnel à des finalités qui dépassent la sphère privée.

Dans un tel contexte, il semble crucial de susciter des lieux où l’on apprend par le débat (qu’il soit grand ou petit) à frotter ses intérêts personnels à de l’altérité, afin de leur éviter de devenir narcissiques. Si aujourd’hui les Églises ont encore un rôle public à jouer, n’est-ce pas celui d’être des « écoles de la vie » où l’on découvre, par l’étude, le partage et l’engagement, comment articuler de manière critique et constructive l’intérêt personnel au bien public ?

 

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À propos Luc-Olivier Bosset

est pasteur de l’Église protestante unie de France à Montpellier.

Un commentaire

  1. aurjptebo@yahoo.fr'

    encore faut il qu elle soit « certifiée » libérale … beaucoup de nos églises virent, en fait, littérales et de ce fait ne font qu’amplifier « la forme collectiviste de courage d être participant »

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