À première vue, tout le monde la recherche. En tant que femme, je tiens particulièrement à l’indépendance financière, qui rend certains choix possibles. Savoir raisonner et penser par soi-même est essentiel, c’est une forme d’indépendance et pas des moindres. Mais faut-il pour autant aspirer à être des « self-made men », qui ne dépendent de rien ni personne ?
Nous ne devenons capables de faire preuve d’indépendance dans notre réflexion que parce qu’il y a eu sur notre chemin des personnes qui nous ont équipés pour penser librement. Notre vie même nous a été donnée par d’autres. Et la saveur de notre vie, d’où vient-elle ? Il nous faut souvent le regard d’un autre pour découvrir une passion pour l’histoire, la musique ou la théologie, une vocation d’artisan, de cuisinier ou d’enseignant. Et les projets les plus fous dans lesquels nous osons nous lancer, comme mettre au monde un enfant, ne sont-ils pas le fruit de rencontres ?
Qu’un être humain puisse être indépendant est une illusion. La richesse de nos vies vient des autres, que nous laissons nous chambouler. Un pasteur m’a dit un jour : « Les autres, il n’y a rien de pire, mais il n’y a rien de mieux non plus ». Il avait mille fois raison. Lorsque nous baptisons un bébé, nous ne lui laissons pas le choix, de même que ceux qui l’entourent ne lui laissent pas le choix d’être aimé. En faisant cela, nous lui apprenons la condition humaine : nous sommes des êtres de relation et ce sont les autres qui nous rendent humains. Le théologien Schleiermacher (1768-1834) disait de la piété qu’elle est le « sentiment de dépendance absolue ». Et Dieu lui-même, est-il indépendant ? Serait-il encore Dieu sans un être humain pour le reconnaître comme son Dieu ?
Pour faire un don, suivez ce lien