En étant le premier à prôner la non-violence comme réponse à l’injustice, et en la théorisant, Gandhi (1869-1948) était-il un visionnaire ?
Nous sommes aujourd’hui confrontés, dans notre société, à des actes de violence insupportables que tous condamnent ; mais la condamnation ne suffit pas.
La Bible présente, tout au long de ses récits, des discours et des images de violence, à commencer par le meurtre d’Abel par son frère Caïn (Gn 4). Le rapport premier et naturel de l’homme à son prochain est décrit comme un rapport de force, de domination, de violence. Le mythe de Caïn et Abel a été probablement introduit pour répondre à la question de l’origine de la violence : il nous propose d’expliquer la naissance de la violence par l’incapacité de gérer les expériences d’inégalité et de frustration (v. 5), puis par la rupture de communication qui découle de cette incapacité (v. 8 dont la traduction littérale est : Caïn dit à son frère, sans complément d’objet). Pourtant Dieu prévient Caïn qu’il a la capacité de dominer sa violence ; elle n’est pas inéluctable.
Si la Bible contient tant de textes violents, c’est que la violence fait partie de notre vie. Mais il faut aussi se demander pourquoi la violence naît et pourquoi, pour certaines personnes, elle est peut-être la seule manière d’exister ; il faut aussi gérer la violence sociale, psychologique, morale.
En faisant du refus de la violence à la fois une philosophie et un mode d’action, le Mahatma Gandhi pouvait-il La non-violence : une utopie ? imaginer qu’il donnerait naissance à une utopie qui, 80 ans après, continue à porter des fruits ?
De la Marche du sel, en 1930 en Inde, au mouvement des étudiants chinois de la place Tian’anmen, de la lutte pour les droits civiques, aux États-Unis, avec Martin Luther King, au combat pour les droits de l’homme en Birmanie, avec Aung San Suu Kyi, en passant par la chute de l’Apartheid en Afrique du Sud avec Nelson Mandela, l’action non-violente a marqué le XXe siècle de son empreinte. « Le mur de Berlin n’a pas été détruit en 1989 par les armes nucléaires de l’Occident, mais par la résistance non-violente des citoyens de l’Est », affirme Jean-Marie Muller, fondateur du Mouvement pour une alternative non-violente (MAN).
Après avoir lancé, entre 2001 et 2010, la Décennie internationale de la promotion d’une culture de la non violence et de la paix, les Nations Unies ont décidé que le 2 octobre (jour de naissance de Gandhi) serait désormais Journée internationale de la non-violence. Verra-t-on un jour les principes de l’action non-violente enseignés dans les écoles de notre pays ? Le texte qui suit est celui de la conférence donnée par Frédéric Rognon , professeur de philosophie à la Faculté de théologie protestante de Strasbourg, aux Journées Évangile et liberté, à La Grande Motte, en octobre 2014. Il nous donne des pistes très intéressantes pour développer la non-violence dans nos communautés d’Église.
À lire le cahier de Frédéric Rognon » Violence, non-violence, non-puissance «
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