Il est là, allongé sur le trottoir du boulevard. Empaqueté dans son sac de couchage et les pièces de tissus qui lui tiennent lieu de couverture, il laisse voir un visage misérable. La crasse a tout envahi, elle a laissé des traces sur les joues, sur le cou. Les cheveux sont hirsutes et raides, et l’alcool trop souvent et trop longtemps consommé donne à l’homme un teint rougeaud et le visage congestionné. Il ne dort pas. Bien animé, il s’adresse à sa compagne. Elle aussi est là, allongée sur le trottoir du boulevard. Tout aussi sale, le cheveu filasse, le visage bouffi, coloré par la couperose. Elle a en plus un fantastique oeil au beurre noir qui abîme son visage déjà marqué par l’exclusion.
Ils sont là, allongés sur le trottoir du boulevard, et l’homme est en train de « conter fleurette » à sa compagne qui reçoit le discours en souriant et en minaudant. Ses yeux brillent d’un éclat mystérieux sur son visage. Ils discutent, échangent, ils s’aiment, ils vivent, ils sont beaux. Étrange couple qui irradie la vie et la joie, qui pose la dignité de l’humain dans la beauté de l’amour. Là, sur le trottoir du boulevard, il n’y avait pas d’exclu, mais deux êtres humains… Et ils n’étaient pas seuls, car si je n’ai jamais vu Dieu, je sais que ce jour, Lui aussi était là, allongé sur le trottoir du boulevard.
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