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Incompréhensible résurrection

La « résurrection d’entre les morts » de Jésus demande à être expliquée de manière accessible aux néophytes. C’est ce que n’a pas toujours su faire l’apôtre Paul, tellement pour lui cette résurrection se comprenait d’elle-même. Il connut donc quelques confrontations difficiles.

  L’apôtre Paul était bien courageux de proclamer son Évangile au monde. Il a eu des ennuis avec les juifs, parce que pour eux, le Messie devait renverser le monde et Jésus n’avait à leur avis rien renversé. Il a eu des ennuis avec les Grecs parce que pour eux la résurrection des corps était impensable.

  La rencontre avec les Athéniens a conduit à un échec parce que Paul ne leur a pas assez bien expliqué ce qu’il entendait par « résurrection des morts ».

  Athènes était la capitale de la philosophie, c’està- dire de la manière d’interpréter le monde, de comprendre le rôle de l’homme dans l’univers, de savoir comment il devait s’y comporter. Il y avait à Athènes bien plus de philosophes au kilomètre carré qu’aujourd’hui dans n’importe quelle capitale. Comme le dit Luc, on en trouvait toujours sur la place publique, à discuter des dernières nouveautés et à démontrer qu’ils avaient raison. C’est ici le seul endroit du Nouveau Testament où les épicuriens et les stoïciens sont explicitement nommés.

  Les épicuriens étaient des moralistes, très austères, qui essayaient de vivre le plus simplement possible. Ils se contentaient de ce qu’ils avaient. Épicure disait : « Il n’y a rien à craindre de la mort, car aussi longtemps que je vis la mort n’est point là. Et lorsqu’elle survient, c’est moi qui ne suis plus là. » Cette façon de voir, qui s’appuie sur la pure logique, n’était pas celle que Paul avait coutume d’exposer.

  Les stoïciens recherchaient aussi la vertu, le comportement moral fondé sur l’effort et la recherche du bien, et, suivant Aristote, ils professaient que tout est matière, y compris la connaissance, y compris les choses divines. Cela n’était pas non plus dans les idées de Paul.

  L’apôtre savait bien qu’Athènes était le centre de la culture, de la connaissance du monde et de la science morale. Comment, dans ces conditions, présenter la proclamation chrétienne, à peine sortie de terre, et qui n’était appuyée sur aucun traité comme les grands philosophes en avaient produit de si nombreux ?

  On comprend la difficulté et la prudence de Paul qui va à l’Acropole à pas de velours. Il cherche le point de contact, à travers leur sentiment religieux et cette inscription lue sur un temple : « Au dieu inconnu ». Pour une fois les Grecs admettent qu’ils ne savent pas tout de la divinité. Il faut s’enfoncer dans cette brèche. Ce Dieu que vous ne connaissez pas, explique Paul, c’est celui que je viens vous annoncer, le créateur de l’Univers, le Seigneur du ciel et de la terre, celui qui donne la vie et le souffle.

  Les Athéniens se taisent et écoutent. Le contact a l’air de prendre. Paul avance quelques pions supplémentaires : Ce Dieu a créé tous les peuples de la terre ; il a défini le temps et les espaces habitables. Il est proche de chacun de nous. L’apôtre va jusqu’à citer le poète grec Épiménide : « C’est en lui que nous avons la vie, le mouvement et l’être. » Et encore le philosophe Aratos : « Nous sommes de la race de Dieu. » Bref, les philosophes croient en Dieu et P aul aussi. Donc on peut s’entendr e. D’autant plus que ce Dieu des philosophes pousse les hommes vers le bien. Paul ressent un acquiescement et il va pousser son avantage : « Ce Dieu va juger le monde à travers l’homme qu’il a désigné et qu’il a ressuscité d’entre les morts. » Quoi ? Un mort qui ressuscite ? Cela est incompréhensible pour les Grecs. Ils s’en vont en disant qu’ils l’écouteront une autre fois.

  Ainsi, Paul a parlé trop vite, il n’a rien expliqué. Il n’a pas dit quel sens pouvait avoir cette résurrection, sur quoi il se basait pour affirmer cela. Une résurrection qui est affirmée sans arguments, sans commentaires qui permettraient à ces savants de situer le phénomène par rapport à leur vision du monde, a conduit à l’échec de la prédication. Il n’y aura pas de philosophe chr étien à Athènes.

  Mais combien de chrétiens aujourd’hui font la même erreur, malgré les avertissements de Luc ?

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À propos Henri Persoz

est un ingénieur à la retraite. À la fin de sa carrière il a refait des études complètes de théologie, ce qui lui permet de défendre, encore mieux qu’avant, une compréhension très libérale du christianisme.

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