Réalisme
On a pu reprocher à notre discours religieux et
social son manque de réalisme. Les chrétiens seraient
de doux rêveurs proposant des solutions impossibles et très
idéalistes aux problèmes de notre temps.
Les réalités économiques sont là,
incontournables, et nos mots ou nos combats les plus beaux seraient
creux dès lors quils ne sy soumettraient pas purement
et simplement.
Occupez-vous du Ciel, nous, les réalistes, nous
nous occupons de la terre !
Mais il ne sagit pas de faire rêver quiconque
avec une religion opium du peuple promettant aux croyants des paradis
merveilleux en échange dune résignation devant les
puissances infernales et les forces tyranniques de notre monde.
La révolte fait partie de notre foi. Croire, cest
vouloir avec passion.
Jésus ne sest soumis ni aux forces de la
haine, de linjustice, du mal, de la mort, ni aux pouvoirs religieux.
Notre révolte dit oui au Dieu de Jésus,
celui avec lequel le mot despérance nest ni une attente
passive ni une chimère démobilisatrice, mais une lutte,
un dynamisme transfigurateur, un courage dêtre (P. Tillich).
En ce début dannée, nous dirons et
redirons que si nous ne dessinons pas pour lhomme un projet différent,
prometteur, défiant les fatalités, alors notre foi est
néant.
Nous allons vivre en 2008 les 40 ans de Mai 68. Que notre
espérance ait nom utopie, Royaume de Dieu, combat prophétique,
peu importe, elle ne fait pas sien le réalisme des sages et des
bien-pensants résignés.
Jai, pour ma part, toujours aimé cette maxime
un peu folle de Mai 68 : « Soyez réalistes, demandez limpossible
! » Nous le demanderons à Dieu peut-être, mais à
nous dabord ; cest en effet lui qui nous appelle à
laide.
Exauçons-le.
Laurent
Gagnebin