Numéro 208
|
LÉglise et la Synagogue. Peinture sur bois. Période estimée entre 1150 et 1200. Zillis, Église Saint-Martin |
La Bible nous raconte une histoire dAlliance. Dieu créateur a voulu faire alliance avec toute lhumanité, Adam et Ève : ce fut un échec. Alors Dieu recommença avec une partie de lhumanité, Noé et sa descendance. Nouvel échec. Nouvel essai avec Abraham, puis enfin avec la descendance de Jacob : ce sera le peuple dIsraël qui acceptera lAlliance. Dieu lui offrira les « Dix Paroles », mais le summum du message divin sera entendu avec limpératif « Tu aimeras ton prochain comme toi-même » (Lv 19,18).
Jésus de Nazareth était fils de ce peuple, ses disciples étaient juifs. Jésus enseignait dans les synagogues, dans le Temple, ses discours citaient la Thora, les prophètes et les psaumes. Les racines du christianisme sont incontestablement juives.
Pourtant Jésus a été un juif atypique, « libéral », qui a voulu réformer le judaïsme. Son attitude face à la Loi, son discours sur le Temple, son audience auprès du peuple, lont conduit au supplice de la croix. Mais il na probablement jamais pensé quil ouvrait la voie à une nouvelle religion. Il faut attendre les épîtres de Paul (entre 50 et 60) puis les évangiles et les Actes pour percevoir les tensions dans les communautés judéo-chrétiennes, entre elles et avec les juifs. Les « hellénistes » (Étienne et Philippe) donnent dans leurs communautés un rôle plus important aux lois morales quaux lois rituelles et cela provoque avec les « hébreux » (Jacques) des débats qui transparaissent dans les controverses entre Jésus et les pharisiens. Paul radicalise le débat, remplace le « salut par la Loi » par le « salut par la Grâce ».
La séparation entre judaïsme et christianisme était inévitable.
En 70 les Romains détruisirent le Temple et létat juif disparut. Puis le christianisme se répandit, et les juifs furent soumis à la ségrégation, aux massacres, à lantisémitisme dÉglise ou populaire. Une évolution au siècle des Lumières nempêcha pas la Shoah au XXe siècle, avec la mort de six millions de juifs et la stupéfaction horrifiée du monde.
Aujourdhui, si lantisémitisme na pas disparu, les chrétiens ont pris conscience de leur responsabilité historique, de la richesse du dialogue interreligieux et de la spécificité du dialogue judéo-chrétien. Après le « Il est interdit dinterdire » de mai 68, la loi a repris son statut de nécessité dans la structuration de la personne. Certaines difficultés dans les relations entre juifs et chrétiens peuvent sexpliquer par leur proximité qui rend les discussions passionnelles. Mais des groupes se réunissent pour partager les interprétations juive et chrétienne des textes bibliques ; un dialogue fructueux sest établi. Une réflexion théologique, dont Florence Taubmann se fait ici lécho, a commencé et doit se poursuivre dans un climat dépassionné.
Marie-Noële et Jean-Luc Duchêne
Commenter
Les traductions de la Bible font une distinction entre ceux qui se lèvent et ceux qui ressuscitent, alors que le verbe grec est le même. Jusquoù ont-elles raison ?
Les ressuscités dEmmaüs (Luc 24,13-33), par Henri Persoz
Les évangiles marquent un certain embarras pour expliquer la résurrection. On le serait à moins. Comment expliquer que lon puisse être mort et vivant à la fois ? Le genre littéraire utilisé est celui des apparitions. Elles se placent au-delà de lhistoire, dans un monde qui force la réalité, pour mieux communiquer des impressions fortes ; de la même façon que les peintres impressionnistes forçaient la réalité des couleurs et des formes pour mieux exprimer des vérités ultimes, que la simple description de ce quils avaient vu serait incapable de signifier...
En Bref
Dans le monde et dans les Églises par Claudine Castelnau
États-Unis : Religion et politique
Anglicanisme : Polygamie et « colonialisme »
France : Créationnisme version musulmane !
Nigeria : Carte délecteur = communion
Paraguay : Un évêque suspendu a divinis
Raconter
Sans prétentions dogmatiques, ni même théologiques, le pasteur Alain Houziaux nous livre ici un conte philosophique et poétique. Et si Dieu nous faisait ses adieux ?
Le testament de Dieu, par Alain Houziaux
Oui, moi qui suis le dernier des dieux, il est temps que je men aille et je viens vous faire mes adieux. Pourtant, jen conviens, vous mavez reçu comme un prince. À bien des égards, vous vous êtes mis en frais. Souvent vous avez fait de moi le roi de vos fêtes et de vos enchantements. Jétais le dieu des pâquerettes, des oasis et des printemps qui renaissent. Jétais la sève de vos soleils et de vos firmaments, le point dorgue de vos cantilènes, le mystère de vos rêves et la consolation des honnêtes gens...
Réagir
Le confessionnal et lisoloir, par Laurent Gagnebin
On peut trouver des ressemblances entre le confessionnal et lisoloir. Il sagit dans les deux cas despaces bien délimités souvent sous forme de cabines, lun dans le cadre ecclésial et romain, lautre dans un cadre civil. Les deux sont en rapport direct avec le secret et nous mettent à labri découtes et regards indésirables ; ils permettent de sisoler. Se confesser est parfois une obligation. Il en va de même pour lisoloir : on ne doit pas, en loccurrence, voter et choisir son bulletin au su et vu de tous. Mais là sarrêtent les proximité...
Regarder
Lire
Livre : Le pari de la décroissance
Résonner
La Cène ne laisse pas indifférent. De nombreux artistes contemporains la représentent et lui donnent un sens original, entre invention et subversion. Premier tableau dune nouvelle série.
La Cène de Bernard Buffet, entre le tribunal et la grâce, par Martine Grenier
La Cène de Bernard Buffet (1928-1999) appartient à un ensemble de tableaux retraçant des épisodes de la vie du Christ. Réalisées en 1961 pour décorer la chapelle de sa résidence de Château lArc, près dAix-en-Provence, ces uvres furent données au musée du Vatican par le peintre en 1971. Dans cette toile, linstitution de la Cène est délaissée au profit du jugement de Judas. Pendant longtemps la communion de Judas a été ressentie par lensemble des chrétiens comme leffrayante image de la communion sacrilège. Pourtant, la présence autour de la table de Pierre le renieur, de Judas le traître et dautres disciples plus ou moins dignes, est bien le signe de la Grâce de Dieu qui nous accueille tous...
Nouvelles
Courrier des Lecteurs
Évangile & liberté comprend une page entière consacrée au Courrier des lecteurs. Nous voulons ainsi une page vive, animée, publiant librement vos réactions à tel ou tel article.
Citation
En raison même de la référence centrale à Jésus-Christ, il y a un lien inévitable entre la Parole et les situations des hommes : encore une fois, là où ce lien serait brisé, on se trouverait en pleine mythologie. La Parole ne peut être saisie et dite en dehors de la situation daujourdhui, sans quoi ce ne serait plus le Jésus-Christ des évangiles et de toute lÉcriture que lon annoncerait, mais un fantôme intemporel et sans consistance, sans signification aucune pour lexistence quotidiennement vécue qui est la nôtre.
Georges Casalis, Prédication acte politique
Bienvenue |
|
|
en ligne |
|