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Numéro 196 - Février 2006
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Ces versets précèdent ce que nous appelons de décalogue. Curieusement, ils introduisent le lecteur à la loi de Dieu en exprimant deux mensonges. Ils montrent que la Bible peut contenir des contradictions manifestes sans que cela remette en cause son message, sauf à penser qu’elle est un manuel d’histoire.

Deux mensonges pour rappeler deux vérités

Deutéronome 5,1-6

Le saut de l’alliance

Première surprise : Moïse dit aux Hébreux que ce n’est pas avec leurs pères que l’Éternel a conclu une alliance mais avec le peuple qui est là. C’est beau, mais c’est faux ! Lorsque Moïse parle, c’est quarante ans après la sortie d’Égypte (Dt 1,3), période pendant laquelle sont morts beaucoup d’adultes sortis d’Égypte, qui ont été avec Moïse au pied du Sinaï mais qui, par leur révolte, ont été interdits de terre promise (Nb 14,32-34 ; voir aussi Jos 5,4-7). Ceux qui sont là, devant Moïse, sont donc les fils de ceux avec qui l’alliance avait été passée. Le texte lui-même n’est pas dupe de son tour de passe-passe puisqu’il prend le soin de préciser que l’alliance a été conclue avec ceux qui sont là « aujourd’hui, tous vivants », façon allusive de rappeler les pères qui sont morts en route. C’est un petit signal laissé par le rédacteur pour nous dire : « Attention ! Ne faites pas comme si vous ne saviez pas que cela s’est passé autrement. »

À quoi bon ce mensonge ? Quand notre texte biblique triche avec la vérité d’ordre narratif, c’est pour dire juste sur le plan de l’existence : c’est à la génération présente que Dieu s’intéresse, à la génération des enfants qui vont devenir adultes. Son alliance est pour eux qui sont vivants en ce jour : l’Éternel n’est pas le Dieu des morts, il est le Dieu des vivants et, parce qu’il sait que ses enfants ne sont pas des saints, il leur adresse une parole pour les aider à vivre heureux. Ce petit mensonge textuel rappelle que la génération qui nous suit est aussi au bénéfice de la promesse de Dieu, qui se transmet comme un héritage. Encore faut-il que nous prenions nos dispositions pour qu’il soit reçu. L’une de nos missions est de placer le projet de Dieu en face de la génération qui nous suit.

Nous sommes seuls responsables de notre vie

De ce premier accroc à l’histoire biblique découle le second trucage de ce texte. Quand Moïse dit que l’Éternel a parlé face à face avec cette génération, il s’empresse d’ajouter qu’il était entre Dieu et le peuple car celui-ci avait peur de ce qui était en train d’arriver. Moïse va jusqu’à préciser que le peuple n’est pas monté sur la montagne, soulignant le fait que le peuple n’a pas pu être face à Dieu.

Que signifie ce nouveau mensonge ? Moïse est en train d’aider un peuple à naître en faisant de la génération des fils une génération d’adultes. Dans quelque temps il faudra le circoncire. Pour le moment, nous en sommes au point où il faut couper le cordon ombilical. Moïse va mourir, il ne pourra donc plus nourrir les Hébreux et pourtant il faut que le peuple lui survive ; il faut que le peuple sache trouver sa nourriture tout seul.

Pour devenir majeurs, les enfants doivent cesser de penser par l’intermédiaire de leurs parents ; est véritablement majeur, un adulte qui cesse de voir le monde uniquement à travers les yeux et l’intelligence d’un autre ; être majeur, c’est cesser d’être assisté en toutes choses et s’affranchir de la peur de faire face à la vie.

De ce second manquement à la cohérence du récit, émerge une évidence : il faut, un jour, cesser de vivre à travers les autres. Cela nécessite que celui qui transmet s’efface pour laisser celui qui reçoit seul face à ce qui le fera vivre : aux pasteurs, par exemple, de ne pas faire écran entre Dieu et les paroissiens. Mais il appartient aussi à chacun d’affronter personnellement le quotidien : aux citoyens, par exemple, de faire face à leurs responsabilités sans s’en remettre entièrement à un chef de parti, à un média ou une institution qui offre une pensée prête à être consommée ou des décisions prêtes à être votées. Cet avant-propos à la loi nous rappelle que c’est à la condition de ne pas avoir peur d’être face à ce qui appelle à une vie responsable que le projet promu par cette loi restera actuel : « Vivre hors de la maison des esclaves. » feuille

James Woody

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