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Numéro 194 - décembre 2005
( sommaire )

Agir

Isabelle Lozeron-Hervé, pasteur de l’Église réformée à Aulnay-sous-bois, ville fortement secouée par les violences urbaines de novembre, revient pour nous sur ces événements.

Vaincre les peurs

Tout a déjà été dit sur la situation des banlieues et sur les événements de début novembre. Rappelons tout de même ici que la volonté politique de surveiller de plus près les trafiquants de drogue et les dealers, n’a pas été bien perçue. Aussi, le premier prétexte a été bon pour essayer de faire des quartiers de banlieue en difficulté des zones de non droit, en y semant la terreur. Les plus jeunes ont été placés en première ligne, face aux forces de l’ordre, comme rempart des commanditaires. En quelques nuits, les banlieues se sont véritablement enflammées. Voitures, magasins, entreprises, écoles, ont été incendiés. Les populations de ces quartiers, en plus d’avoir perdu le peu de bien qui leur appartenait, n’ont plus osé sortir de chez elles, n’envoyant plus, pour certains, leurs enfants à l’école de peur que les violences ne gagnent la journée…

Très vite il y eut un effet boule de neige, débouchant sur une revendication plus sociale.

Au milieu de ces événements la paroisse réformée d’Aulnay et les autres communautés religieuses (catholique, juive et musulmane) ont réagi très rapidement, marquant leur opposition et leur volonté d’un retour rapide au calme. Un temps de prière interreligieux pour le retour à la paix a prouvé cet attachement commun.

Sapeurs-Pompiers

Les Sapeurs-Pompiers éteignent l'incendie d'un bâtiment public détruit lors des nuits d'émeute de Novembre 2005. Photo D.R.

Le résultat des ces nuits a été l’installation légitime d’un climat de peur qu’il nous faut maintenant dépassionner et auquel il ne faut pas laisser de prise. Les amalgames sont tellement rapides ! La volonté des instigateurs était justement celle là. Une casquette, une couleur de peau, une appartenance religieuse, ou encore le fait d’habiter certains quartiers doit faire peur, comme pour faire croire que tous les habitants sont responsables, associables et irrécupérables. Or la réalité est tout autre. À Aulnay comme ailleurs, ce sont essentiellement des groupuscules de jeunes désœuvrés qui ont semé la panique. La majorité des habitants ont marqué leur opposition à ce qui se passait. Alors que les municipalités et les habitants déploient tant d’énergie à valoriser leurs quartiers, tout le travail accompli depuis des années se trouve anéanti en quelques heures.

La peur vient toujours de ce que l’on ne connaît pas, ou pire, de ce que l’on croit connaître. Les médias en ce sens ont une grande responsabilité. Le manque de recul face aux événements leur a fait croire qu’il s’agissait exclusivement d’une révolte sociale, en stigmatisant particulièrement les personnes issues de l’immigration.

Aujourd’hui il nous faut reconstruire, pas seulement ce qui est matériel, mais d’abord des hommes, des femmes et des enfants mis à l’épreuve. Il s’agit de leur redonner confiance en eux, et de restaurer la confiance dans ces populations victimes. La mission de l’Église réformée est sur ce point très importante : établir des liens entre les quartiers (« sensibles » et « favorisés »), mais aussi et surtout, entre les différentes communautés dans nos Églises. La première volonté devrait être de rechercher l’échange, le partage et la rencontre. Ce n’est qu’en connaissant réellement les gens, en allant vers eux, que nous savons véritablement ce qui les anime. Depuis plus de trente ans la paroisse d’Aulnay a travaillé à ce rapprochement, réunissant dans sa communauté des protestants « historiques », des prosélytes mais aussi et surtout des immigrés de première, deuxième et troisième génération. Cette volonté de la paroisse de fédérer, est commune à tous les paroissiens. Vivre avec l’autre, discuter, partager, n’est-ce pas le seul moyen de faire tomber les barrières que nous dressons entre nous et les autres ?

Aussi l’Église doit se sentir un devoir de rapprocher les populations pour vaincre les peurs. Elle doit être un lieu de rencontre fraternelle, où l’autre ne sera plus « étrange ». feuille

Isabelle Lozeron-Hervé

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