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Noël aux frontières du millénaire :
de la fête en éclats à la quête de la foi

Comme il est agréable de réfléchir hors contexte sur la fête de Noël! On évite alors les réactions à chaud d'euphorie douce ou de rejet vengeur. Entre ceux qui stigmatisent en elle la paganisation d'une fête chrétienne et ceux qui y déchiffrent la christianisation d'une fête païenne, la guerre est ouverte. Grincheux austères et méprisants contre évaporés syncrétistes, les uns y voient le meilleur signe d'une société décadente pourrie par l’argent, engluée dans ses évasions multiformes, les autres l’harmonie retrouvée où les valeurs chrétiennes d’enfance, d’espoir, de générosité, donnent sens et valeur à la fête. Certains aussi choisissent la schizophrénie : d’un côté le Noël chrétien, de l’autre la fête païenne. Mais où passe la frontière ?

Pour ma part, j’aurais tendance à croire que la frontière entre paganisme et christianisme n’existe pas, qu’elle n’est qu’un artifice dogmatique qui n’a jamais correspondu à rien dans la vie des chrétiens.

Noël fête de quoi ?

Comment ne pas d’abord voir en Noël la plus grande fête internationale du commerce, de la gloutonnerie, du gaspillage, de l’égoïsme des riches aveugles à la misère du monde ? Noël est peut-être avant tout la fête des objets, la plus grande circulation d’objets de l’année et donc la seule grande fête d'une société qui vit sous le règne de l’objet.

Fête des objets, mais aussi fête de l’évasion, où dans l’abrutissement de nourritures, d’alcools, de bruits, de lumières, de musiques sirupeuses et clinquantes, le bébé de la crèche n’est plus qu’accessoire folklorique à côté des rites sacrés de la dinde, du sapin, des cadeaux. Et ces rites s’accumulent sans lien apparent les uns avec les autres et se mélangent dans une bouillie informe où tout esprit lucide s’égare.

Comment se repérer, noyé dans ces cauchemars de forêts d’arbres enguirlandés où rôdent des vieillards rouges aux barbes cotonneuses, aux sentiers encombrés de broussailles électriques qui hantent les rues des villes et les rêves des enfants ? Et ces derniers, quel rapport de sens peuvent-ils trouver entre le sapin, la dinde et les cadeaux ? Quelle relation de famille arrivent-ils à penser entre le Père Noël et le petit Jésus ?

C’est la fête du syncrétisme galopant où tout perd sens de se brasser dans une mélasse indigérable. Le rêve absurde de Constantin croyant maintenir l’unité de son empire en voulant faire coïncider la fête de Mithra du soleil invaincu avec la fête chrétienne de la Nativité a abouti au XXe siècle à ce magma monstrueux où plus personne ne se retrouve.

Noël, quête de foi

Et s’il manquait un centre à tout cela ? Si en plaçant au milieu cette image simple d’un enfant en qui Dieu se donne, tout le reste reprenait sens ? Le sapin devient lien retrouvé du ciel et de la terre, des racines à l’étoile ; son feuillage qui résiste à la mort de l’hiver se fait signe d'une vie sans fin, ses bougies ou ses lampes symbolisent la lumière jaillie de la nuit de Noël. Le Père Noël, dispensateur d’abondance, peut être signe de générosité gratuite, préservant l’origine céleste du cadeau donné sans calcul.

Les cadeaux eux-mêmes font découvrir la seule joie profonde qui est celle de donner, signe d'une économie toujours nouvelle qu’ouvre le Dieu de l’Evangile en se donnant lui-même pour rien, l’économie de la grâce, du don et du pardon sans condition.

Même les repas, dindes, bûches ou puddings, deviennent signe de joie et de partage, signe par excellence du Royaume d’abondance et de paix.

Alors que faire de Noël, le fuir ascétiquement ou s’y fondre euphoriquement ? Noël est la folie de Dieu, son humanisation, sa paganisation. Pourquoi ne pas vivre cette folie sans contrainte, mais en se recentrant toujours à nouveau sur ce qui est seul capable de donner sens à tout le reste, à Noël comme à chaque acte de la vie, Dieu présent et vivant parmi les hommes ? Nos Noëls actuels ressemblent à la vie de beaucoup où se juxtaposent des éléments divers sans espace pour les relier ou leur trouver un sens. Mais pourquoi ne pas rêver que ce XXIe siècle qui semble s’ouvrir dans un climat de religiosité diffuse, verrait les hommes chercher à recentrer leur vie sur un fondement religieux, par exemple sur ce Dieu étonnant révélé à Noël ?

Jacques Juillard

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