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Eschatologie

 

Ce mot, d’origine grecque, ne parle pas à nos contemporains. Il est réservé aux théologiens. Il vient du mot eschatos qui signifie le dernier, celui du bout du monde, de la fin, ce qui est le plus éloigné de nous, le plus reculé. Il est souvent employé dans le Nouveau Testament, par exemple lorsque Jésus recommande (en Lc 14,10) aux invités à un repas d’aller se mettre à la dernière place, c’est eschaton. Et lorsqu’il dit que les premiers seront les derniers (Mt 19,30), c’est encore eschatoi, ceux qui sont repoussés le plus loin de nous.

À l’époque de Jésus, comme aujourd’hui, le classement des hommes, les uns par rapport aux autres, était une sorte d’obsession, même parmi les disciples. Il faut être le premier partout, à l’école, à la course, dans l’entreprise, dans les sondages, dans l’estime que l’on vous doit, à l’arrivée au tombeau, dans le Royaume des cieux. Jésus s’oppose à cette maladie du classement : les premiers, qu’ils soient à l’autre bout, le plus loin possible, les derniers. Par exemple, il raconte la parabole dite « des ouvriers de la onzième heure ». Dans cette histoire, des ouvriers sont embauchés dès le matin et vont travailler dur toute la journée, tandis que d’autres, arrivés sur le tard, ne sont embauchés qu’à la onzième heure du jour. Mais au moment de la paye, le maître fait appeler les derniers arrivés (eschatoi) en premier et leur donne autant qu’aux autres. Bouleversement des valeurs : la sagesse qu’enseigne Jésus se pose à l’inverse de ce que recherchent les hommes. Il ne s’agit pas d’être servis en premier mais de servir les derniers arrivés, ceux qui viennent peut-être du bout du monde. Le mot eschatos est aussi utilisé pour parler du dernier jour, des fins dernières, surtout dans l’évangile de Jean. D’où le mot « eschatologie » qui est pour les théologiens la science des fins dernières, lors de l’avènement du Fils de l’homme.

Du temps de Jésus, et devant la souffrance du peuple, occupé et asservi depuis tant d’années, beaucoup de juifs attendaient une délivrance venue du ciel, un Messie qui chasserait les Romains, rétablirait la paix pour toujours et Israël dans ses droits et sa liberté. On retrouve déjà cette attente dans les livres tardifs de la Bible hébraïque, par exemple le livre de Daniel (12,2) qui s’exprime ainsi : « À la fin des jours, ton peuple (Israël) sera sauvé. Tous ceux qui se trouvent désignés dans le Livre de la vie, et beaucoup de ceux qui dorment dans la poussière de la terre se réveilleront, les uns pour la vie éternelle, les autres dans l’humiliation et l’horreur éternelle. »

Après la mort de Jésus et avec l’apôtre Paul, une branche importante du christianisme, dite la Grande Église, se mit à assimiler ce Messie attendu à Jésus lui-même et, comme il était mort et ressuscité, à attendre son retour imminent. Les évangiles synoptiques décrivent d’ailleurs ce grand retour du Fils de l’homme, les tribulations qui doivent l’accompagner et le jugement final qui fera entrer les justes dans le Royaume de Dieu. (Mt, 25 ; Mc, 13 ; Lc, 21).

Seulement le Messie ne revenait pas et les fins dernières se faisaient attendre. Encore aujourd’hui d’ailleurs, certains chrétiens l’attendent toujours et le Symbole des Apôtres, encore en vigueur dans beaucoup d’Églises, précise même que Jésus reviendra sur la terre « pour juger les vivants et les morts ». Comme s’il n’y avait pas déjà assez de vivants à juger, et qu’il faudrait en plus juger les morts ! Pour d’autres chrétiens, cette attente « eschatologique » se comprend comme une utopie, une aspiration à un monde meilleur qui doit survenir par l’engagement des hommes qui ont compris que Dieu n’était pas un magicien et que donc rien ne se fera sans eux. Jésus a indiqué le chemin : servir d’abord les derniers arrivés au lieu de se servir en premier.

Mais aussi ces derniers jours devraient être les premiers. Faire advenir en premier le Fils de l’homme. L’eschatologie, c’est maintenant, en priorité.

 

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À propos Henri Persoz

est un ingénieur à la retraite. À la fin de sa carrière il a refait des études complètes de théologie, ce qui lui permet de défendre, encore mieux qu’avant, une compréhension très libérale du christianisme.

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